Le genre :
dramatique paysanne du samedi soir sur France 3.
Je ne comprends pas trop ce que film foutait dans la
sélection de Cannes. Ou plutôt si, j’ai peur de comprendre. Un sélectionneur
pervers a cru qu’il pouvait refaire le coup de Drive, une récompense inattendue pour un film inattendu, un film de
genre violent, sur lequel personne n’aurait misé un kopeck et qui souffle tout
le monde. Le problème, c’est que Drive
était vraiment un film à part dans sa forme, un vrai film de genre mais avec un
sens aigu de l’innovation.
Des hommes sans loi,
c’est plutôt un film qui se veut film de genre, mais qui souffre de son côté
pompeux, et de sa vacuité. On sent que John Hillcoat a voulu tout faire, une
apologie de la simplicité de la campagne, genre Et au milieu coule une rivière, un film de gangster à la Mann, un Il était une fois en Amérique rural.
Mais qu’a-t-il fait ? Déjà, une erreur en annonçant dès
le générique que c’est une histoire vraie. Parce que les frères Durabont ont
existé, certes, mais qu’en ne prenant comme unique source que l’autobiographie
de l’un d’eux, il a perdu toute distance critique par rapport à sa fresque sur
la Prohibition. Du coup, le film verse dans la célébration grotesque d’une
famille présentée comme des petits gars sympa de la campagne qui faisaient du
whisky tranquilou dans la cave, même si ce n’est pas légal légal. Des petits
gars sympas qui n’hésitent à castrer un homme de main à la serpe pour envoyer
les couilles en cadeau à son patron…
De la même façon, l’agent spécial du FBI est, à l’inverse,
un personnage parfaitement grotesque, qui tient vraiment des méchants de
Batman. Un genre de dandy hystérique de la propreté et ultra-violent, qui
arbore une magnifique collection de fringues et de crèmes pour la peau, assez
proche du mélange entre le Joker et le Pingouin. Un des rôles les plus queer de
Guy Pearce, sourcils rasés (va savoir pourquoi), encore plus dans la caricature que
dans Priscilla, folle du désert. Un
portrait tout en nuance, donc.
On peut s’extasier autant qu’on veut sur la qualité de la
réalisation et sur les filtres orange automnal (Dieu sait pourtant si j’aime
bien les films à filtres, Bienvenue à Gattaca
est un de mes films préférés), ça n’en fait pas un bon film, parce qu’il n’y
aucun recul, contrairement à Drive
qui, avec un scénario très mince et basique, faisait tout pour être où on ne l’attend
pas.
Le casting est à l’avenant, en roue libre, chaque personnage
n’étant caractérisé que par un détail. Pour renforcer le côté taiseux de Tom
Hardy, le personnage grogne régulièrement en guise de réponse. Ça fait
peut-être rire tout le monde, mais c’est surtout le signe qu’il fallait bien un
gimmick, parce qu’Hardy n’arrive pas à construire son personnage. Shia LaBeouf
joue le mec dépassé par les événements, comme d’habitude, avec strictement le
même jeu que dans Transformers ou
dans Wall Street 2. Les deux rôles
féminins ne servent à rien, si ce n’est apporter un semblant de légèreté dans
ce qui ne serait sinon qu’un laborieux gunfight campagnard. Dane DeHaan, repéré
dans Chronicle, pourrait s’en sortir,
s’il n’était pas cantonné dans le rôle de gentil garçon timide. C'est oublier
que dans Chronicle, l’intérêt de son
personnage résidait dans le potentiel de violence que recèlent les grands
frustrés.
Sans spoiler trop, les deux scènes finales sont à tomber de
son fauteuil. L’une est une scène de combat épique qui doit clore l’histoire,
mais s’avère totalement invraisemblable. C’est d’ailleurs à ce moment que le
réalisateur tente enfin de se raccrocher aux branches et de justifier plus
clairement pourquoi les flics sont si méchants, ce qu’il a peu oublié plus tôt.
Et nous arrivons enfin à un épilogue ahurissant sur les valeurs familiales
autour du repas du dimanche avec les bambins. Le problème, c’est que quand on
veut faire l’apologie d’une famille de criminels, il faut soit être tragique,
soit être cynique, et certainement les deux. Pas dire que finalement tout est
rentré dans l’ordre. Vous imaginez sérieusement le Parrain finissant sur Michael qui devient consultant ? Casino avec un Sam devenu serveur ?
Les Affranchis ou Henry ne regrette
pas son ancienne vie ? Non, bien sûr, toute la mystique de la saga de
gangster américaine est fondée sur le fait que c’est une vie qui n’offre pas de
rédemption.
Bref, un film qui n’est pas particulièrement bien joué, ni
très bien écrit. Longuet et fatiguant. Un semi bon point pour la costumière,
qui s’est éclatée sur le thème paysan pauvre. Rigolo, excepté que, même quand
il censé n’avoir pas un rond, Shia ne porte jamais les mêmes fringues. Très
jolies variations sur le thème de la chemise en jean et du velours côtelé. Invraisemblable,
mais qu’importe.
La minute geek :
je me demande parfois quelle mouche a piqué Refn et Nolan d’aller ressortir
Tom Hardy des cartons. N’oublions pas qu’avant, son seul vrai rôle,
curieusement oublié dans sa bio wikipedia, quoique mentionné dans sa filmo, c’est
Shinzon dans Star Trek Nemesis. Et
vous pouvez croire et le fan de blockbuster un peu con et le fan de Star Trek
que je suis, Némésis, il vaut mieux
oublier. Ça vous fera trop de mal.
La minute du
sériephile : Mia Wasikowska et Dane de Hann ont tous les deux été des
patients de Gabriel Byrne dans In treatment.
Ils auraient dû s’en contenter et éviter ce film dispensable.
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