mardi 14 mars 2017

Logan, un peu de noirceur dans un monde de brutes



La franchise s’offre le luxe d’un final à la Rocky Balboa ou John Rambo, sur le vieillissement, le renoncement et la transmission. Crépusculaire et stylé, quoique longuet

Logan, c’est à la fois l’adieu de Hugh Jackman et Patrick Stewart à leurs rôles de Wolverine et Charles Xavier et une forme de point final aussi élégant qu’étonnant à une franchise qui n’a que trop duré. Avec ses héros vieillis, qui se demandent si, au fond, ce qui compte n’était pas de protéger les siens et pas le monde, Logan tire en effet un bilan sombre du concept même de la franchise et questionne en sous texte l’avenir du film de super héros.

On commence en 2029, dans un monde très proche du nôtre, où la mutation a disparu, et où les seuls quelques mutants survivent. On y recroise un Wolverine vieilli, alcoolique et chauffeur de Uber, qui peine à sortir ses griffes et se régénérer. Il protège un Professeur X alzheimerisé, oscillant entre démence, haine de soi et petites crises potentiellement fatales pour tous ceux qui l’entourent.

Oui mais voilà, il reste quelques mutants, des enfants soldats parfaits, créés par l’armée. Et dans un baroud d’honneur poussiéreux entre le Texas et  le Dakota, Wolvie va reprendre du service pour protéger une jeune fille. On devine dès le début que ce road movie n’a pas d’issue positive, parce qu’au fond, ses deux héros se foutent de leur quête mais espèrent simplement qu’elle leur redonne un peu de sens, sans jamais trop y croire.

Le film de Mangold prend ironiquement la grosse machine X-Men à rebrousse-poil, avec un monde où les mutants sont un vague souvenir de geek, et même plus dans l’opinion une menace, mais simplement un élément du passé, un brin ringard. Beaucoup plus contemplatif, Logan table également sur une forme d’action à la fois moins spectaculaire et beaucoup plus radicale dans sa violence, plus proche de la chorégraphie gore que de l’effet special.

Le film n’est pas exempt de défaut, notamment ses longueurs et son insistance qui finit par être lourde sur la difficulté de Wolverine et de sa fille de créer un lien, tant ils sont tous les deux, par nature sauvages. Mais il propose suffisamment de bonnes idées pour sortir du lot, de Patrick Stewart sénile hurlant les pubs Taco Bell à un dîner de famille classique, qui crée ce lien de tendresse filiale surprenant, dans une scène d’intimité qu’aucun X-Men n’a approché, ou meme tenté d'approcher.

A l’inverse de Bryan Singer qui multiplie les apparitions de personnage du comic dans ses films, pour satisfaire les fans, Logan prend plutôt le parti de la distance, avec des clins d’œil, notamment la figurine de Wolverine, pour mieux distancer le personage du mythe et souligner en permanence qu’il est non seulement temps de raccrocher, mais aussi, par sa conclusion, de ne pas espérer une relève. Avec son nombre de morts, il souligne également en permanence l’incroyable violence du genre, qui frise sciemment ici avec le malsain en mettant en scène une gamine sans aucune limite.

C’est cette distance qui porte le film, qui lui donne sa noirceur et en même temps sa force. Dans la catégorie des films de super héros « adultes », Logan l’emporte largement sur Deadpool, en préférant à l’ironie de surface une forme de mélancolie adulte sur les mauvais choix que l’on a fait et d’espoir qu’on peut encore changer les choses, auquel on s’accroche meme sans y croire .

La minute sériephile : Stephen Merchant, Caliban dans le film, est lui aussi spécialiste du malaise, dans un autre genre. Dans son rôle de dragueur incroyablement lourd et égoïste, il fait de Hello Ladies, sa mini-série un OVNI proche de certains épisodes de Striptease, toujours à la limite du rire et de la gêne.

La minute geek : si vous avez toujours eu peur de vous mettre à Star Trek, prenez au moins une heure pour regarder l’ahurissant docu de William Shatner « The Captains » sur Netflix. Des portraits aussi touchants que WTF des acteurs qui ont incarné les capitaines des différentes séries, avec de beaux morceaux de Patrick Stewart sur sa passion pour Shakespeare. Ça vous convaincra peut-être que ces séries sont plus complexes qu’il n’y paraît.

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