lundi 8 août 2016

Jason Bourne : une troublante réflexion sur la standardisation du divertissement













Genre: Previously in Jason Bourne...


Avec Jason Bourne, plan par plan, Paul Greengrass, nous propose un film rigoureusement identique au premier film de la série Bourne. C'est déroutant au début, mais finalement fascinant.
Exploration troublante,et reflexion passionnante, le film se demande s'il existe en tant qu'objet culturel en soi, ou uniquement comme résultante d'un autre film, dont il est pourtant l'exact clone. C'est le même film, mais peut-on vraiment dire que c'est vraiment le même film ? Clairement dans la veine de Pierre Menard, auteur du Quichotte, de Borges, Paul Greengrass pousse en réalité l'abstraction encore plus loin que le vieux maître argentin, et nous propose malicieusement par son film un "Don Miguel de Cervantes, auteur du Quichotte"


A moins bien sûr que ce ne soit tout simplement le film plus incroyablement feignasse de ces dernières années. Pas un début de commencement de volonté de changer quoi que ce soit à une franchise qui marche, ni dans l'intrigue, ni dans la photo, ni dans le jeu, ni dans la realisation...
Jason Bourne est, comme toujours, recherché à la fois par des méchants de la CIA enfermés dans une salle de contrôle et par un méchant tueur à gage sur le terrain, il y a des scènes d’actions en Europe, des chambres d'hôtel sordides, des poursuites en voitures et des bastons. A la fin, Jason Bourne est à Washington ou il s'explique avec les méchants de Washington, avant de disparaître à nouveau sur Extreme Ways de Moby. Rien de nouveau sous le soleil, à un point qui frise le TOC.


Ici et là, un soupçon de mise en garde contre les dangers des réseaux sociaux, une grosse convention tech, un brin d’émeutes à Athènes et de Wikileaks, le tout pour coller à l’actualité et suivre à la lettre cahier des charges d’action « réaliste » des Bourne, et le tour est joué.


L’intrigue ne vous fera pas mal à la tête, et les scènes d’actions sont efficaces, quoique ridiculement identiques. Un personnage marche avec une casquette, jette un coup d’œil furtif et fracture une serrure /cut sur la salle de contrôle de la CIA où des personnages disent « Alpha 4 en approche » « Localisez la cible » /cut sur une baston quelconque où Jason Bourne met au tapis 28 agents de la CIA ou assassins / cut sur le méchant directeur qui dit « Je reprends le contrôle de l’opération, trouvez le et abattez le »/ cut sur Jason Bourne qui pose son blouson pour devenir méconnaissable et se fondre dans la foule.


Si toutefois vous perdez le fil, pas de panique ! En cas doute, c’est simple : si le personnage à l’écran vient simplement d’infliger une triple fracture ouverte du bras et un trauma crânien au policier sans le tuer, c’est Jason Bourne. S’il l’a égorgé ou abattu, alors c’est très mal moralement, et c’est donc Vincent Cassel, le méchant du film (il a souffert, voyez-vous… C’est très bien exploré au cours d’une scène bergmanienne sur la solitude et le tourment de 0,3 secondes).


Alors, faut-il aller le voir ? Si vous avez bien aimé les 3 premiers, certainement, puisque c’est le même. Bourne veut s’imposer comme une franchise parallèle et plus réaliste que Bond, avec la même longévité, comme le souligne la tagline du film " You know my name. " Les esprits chagrins feront de l'ironie facile sur l'absurdité de ce slogan, puisque Bourne est précisément en quête de son identité avant de devenir Bourne... Ce serait bien peu charitable.


La minute geek : on apprendra dans le film que le monde est devenu tellement fan des nouvelles techs, qu'en faisant Stanford, au cas très improbable où tu n'aies pas fondé de start-up de millionaire à 30 ans, tu peux quand même devenir directeur de la CIA, sans expérience de terrain. Il suffit de dire que les autres candidats ne comprennent pas les réseaux sociaux. Le réalisme caractéristique de la série Bourne et sa comprehension des enjeux du monde modern nous frappent une fois encore.


La minute sériephile : je ne sais pas quoi dire, tant ce film ressemble à un épisode parmi d'autres d'une série Bourne, qui répèterait mécaniquement le même schéma dans chacun de ses épisodes comme une série policière très classique. De celles dont on se dit qu'on peut facilement étendre leur intrigue pour les adapter en film. Le Fugitif, par exemple...
Tommy Lee Jones, qui doit en grande partie sa célébrité grand public au dit film savoure-t-il l'ironie de la situation en venant cachetonner ici comme méchant directeur ?


 


 

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