mardi 28 octobre 2014

Mommy



Larmes dans les chaumières, version chic.

Le genre : confessions intimes flamboyant

Puisque j’arrive après la bataille, pas besoin de résumer le sujet de Mommy. C’est l’histoire d’une guerre perdue, d’une mère qui est impuissante face à la maladie de son fils, malgré l’amour qui existe entre les deux. Sauf que ça, Dolan refuse de l’admettre alors que son film le suggère très fortement dès le début. Il prend donc une longue tangente un peu étrange sur la victoire face à la maladie, qui finit par affaiblir son (beau) film.

Dire de Xavier Dolan que c’est un réalisateur talentueux, c’est à la fois tout dire et ne rien dire. Parler de l’émotion, qui est le moteur de son film, c’est une tarte à la crème et ce n’est pas un angle d’analyse. Mais je pense que ne parler du film que par l'émotion qu'il suscite est une erreur, même si je trouve sincèrement que Dolan s’améliore, s’affirme et grandit à chacun de ses films. 

Tout Mommy repose sur la violence des sentiments de ses personnages. La violence de Steve, l’ado gravement hyperactif, violence née de sa frustration, mais aussi la violence de l’amour que lui porte sa mère et la violence du déni de la douleur de Kyla leur voisine. Et toute cette violence combinée, forcément, c’est explosif, et pour le spectateur, ça prend aux tripes. Mais c’est justement le principal reproche que je fais au film, c’est de s’être uniquement concentré sur cette volonté de faire exploser les émotions au visage du spectateur, au mépris de l’histoire qu'il voulait raconter.

Du point de vue du spectateur, comment ne pas comprendre le choix final de la mère, quand, le premier matin de leur réunion, son fils a tenté de la tuer dans un accès de rage ? C’est tout le problème de Mommy, de vouloir exposer et analyser des émotions qui n’ont pas lieu d’être, tant la situation présentée est extrême. De ce point de vue, le film ne fait que s’étirer dans une fausse direction assumée pour atteindre une conclusion attendue, car annoncée dès le cartouche de début du film.

On pourra insister autant qu’on veut sur l’incroyable performance des trois acteurs, notamment le jeune Antoine Olivier Pilon, arrogant et terrorisé par l’absence de contrôle, sur les idées de Dolan en matière de réalisation, notamment les changements de format, il n’en reste pas moins que je ne comprends pas où il veut en venir dans la moitié des scènes, même si je les apprécie isolément.

Le montage sur la vie que pourrait avoir Steve, par exemple, est un magnifique moment d’image, mais quel est son rôle narratif ou dramatique aussi tard dans le film ? Nous annoncer que sa mère comprend, seulement à ce moment, et à regret, tout ce qu’il ne sera pas ? Non, c’est absurde, sa défaite est déjà consommée, elle a déjà renoncé et ce regret est déjà enterré. Dans ce dernier road-trip, elle ne peut à la rigueur se tourner que vers ce qu’il a été, vers le souvenir du bonheur fragile de son enfance, bonheur évoqué mais absent du film.

Tout comme Tom à la ferme, malgré sa grande beauté formelle, ne parvenait pas à être un être un bon polar, Mommy manque pour moi d’une solidité de construction pour être le mélo assumé qu’il voudrait être. Parce qu’il n’y a pas de réel enjeu. La rédemption heureuse de Steve, esquissée dans un montage quasiment emprunté à l’action movie (le classique de la scène d’entraînement qui fait avancer l’action) n’est qu’un leurre. Parce que Dolan est trop fasciné par la beauté pour faire un drame social sombre. Alors que son sujet est bien là.
Mommy est un film rare. Soit. Mais je me demande sérieusement si Dolan n’aurait pas maintenant intérêt à trouver un binôme scénariste avec lequel il se sente à l’aise et qui lui permette de se concentrer sur sa valeur ajoutée, la réalisation (dans le moindre détail) et la direction d’acteurs.
La minute sériephile : comme je l’ai dit, j’aime bien Xavier Dolan. Je pense simplement qu’il n’a pas encore fait son plus grand film. Et j’aime bien Anne Dorval, parce que je suis un fan du Cœur a ses raisons. Et bien par la magie des internets, je peux reconcilier les deux, avec cet épisode de la nouvelle série de Marc Labrèche, les Bobos, avec Anne Dorval, et Xavier Dolan dans un caméo qui fait montre d'une autodérision attachante que je ne lui soupçonnais pas. Le monde est bien fait : https://www.youtube.com/watch?v=2iIWFWpvmd4
La minute geek : quelque chose m’a frappé dans ce film. C’est le décalage entre le futur, puisque l’intrigue se passe expressément dans le futur, et la totale absence de smartphones. Je suppose qu’il s’agit d’une volonté de mettre les personnages dans un champ social isolé, pour mieux souligner la force de leurs rapports. C’est pourtant d’autant plus étonnant que dans ses Amours imaginaires, Dolan avait fait preuve d’un rapport amusé à la technologie et d’un œil rare pour le détail auquel une génération s’identifie immédiatement.

jeudi 16 octobre 2014

Elle l’adore

Sympathique mais incroyablement feignasse

Le genre : inconnu au bataillon. Pas vraiment polar, pas vraiment comédie, pas vraiment satire.

Elle l’adore, c’est l’histoire de deux acteurs qui ne se foulent pas trop. Sandrine Kiberlain y joue Muriel, fan inconditionnelle d’un chanteur de variété, Vincent Lacroix, lequel se tourne vers un jour elle pour faire disparaître le corps de sa compagne qu’il a tué par accident. Hum, intéressant, un truc un peu noir à la Dany Boyle, un soupçon de comédie à l'italienne féroce des 60's ?

Et ben non, un bon film français avec des acteurs sympathiques, parfait pour un prime de TF1 le dimanche soir dans 2 ans. L’intrigue purement policière n’est pas désagréable à suivre, et même pimentée d’un soupçon de vaudeville entre les flics, qui n’est en réalité qu’un accessoire de scénario, mais le tout manque profondément de substance. Le rythme et l'acidité du polar manquent, tout comme l'humour noir, et les quelques moments de suspense sont immédiatement désamorcés, pour revenir dans la comédie gentillette.

Une hypothèse à pousser était celle de la séparation absolue entre l'image publique du chanteur, sous les caméras, et le masque privé, mais c’est à peine si elle fait l’objet d’un plan où le sourire se fige avant de réapparaître. Une autre piste à creuser aurait été l’exploitation cynique que le chanteur fait de ce drame (officiellement, c’est un veuf éploré), mais là non-plus, aucune satire. On préfère montrer que c'est un mec bien, un papa sympa, victime d'un accident. De façon d'ailleurs assez misogyne, l'homicide involontaire est d'ailleurs globalement justifié par le fait que, de l'avis général, sa meuf était une emmerdeuse, volage en prime. Donc bon, ça va, il avait droit de la buter et de faire disparaître le corps, voire de faire accuser de meurtre une inconnue, merde.

Laurent Laffite, dans le rôle du chanteur, a manifestement voulu avoir le beurre et l'argent du beurre, en gardant un personnage sympathique tout en montrant un côté sombre de son jeu. Il compose donc une partition bancale entre le manipulateur qui joue l'étonnement devant la police et la victime piégée qui sombre, à grand renfort d’immobilité et de silence, genre je suis mystérieux et intense. Il ne joue pas mal en soi mais son personnage n'a aucun sens.

Le rôle de Muriel, censée incarner la folie des fans jusqu’au boutistes souffre lui-aussi du même refus de prendre une route narrative. C’est clairement une mythomane, ce qui occasionne de bonnes scènes sur ses mensonges foutraques sur l'épilation de la fille de Klaus Barbie. Mais son attachement hystérique au chanteur n'est pas exploré. Aucun lien n’est en réalité fait entre les deux parties de sa personnalité, simplement posées là en espérant que ça crée un personnage. On aurait, là aussi, pu envisager un scénario glaçant sur ce choix manipulateur d'une fan qu'il ne connaît pas et veut piéger ou au contraire sur le pouvoir grandissant que la fan gagne sur son idole, façon Misery. Mais là non plus, rien.

Un autre point curieux, Laurent Laffitte a manifestement voulu faire bosser les potes de la Comédie Française, dans le rôle du staff dévoué du chanteur (son homme à tout faire et sa femme de ménage, jouée par Muriel Mayette, qui, rappellons-le était administratrice générale du Français au moment du tournage). Je ne sais quelle conclusion psychologique en tirer… Mais en tout cas, ça n'apporte rien au film, si ce n'est un peu de surjeu théâtral.

Rien en soi n’est mauvais dans ce film, mais rien n’y est très bon non plus. Manquant cruellement d’ambition, Elle l’adore laisse curieusement Laurent Laffitte et Sandrine Kiberlain monter des personnages sympathiques, là où ils devraient montrer pour l’un la froideur et le cynisme et pour l’autre le désespoir et la solitude. Pepère, mais globalement pas follichon. Un film de dimanche après-midi ou de mardi soir.

La minute geek : à croire que la police oublie les fondamentaux, alors que la victime est censée avoir été enlevée à son domicile, le dit domicile n’est jamais passé au luminol. Or, le chanteur a nettoyé les traces de sang à l’éponge. Sans donc forcément le soupçonner, la police devrait donc a minima savoir que la scène de crime est chez lui. Mais bon, comme du reste, le film s’en fout un peu, en fait.

La minute sériephile : le décor du commissariat, lui aussi, souffre de cette absence totale de choix. On oscille donc entre un décor un peu aberrant type ors de la République (à mon avis tourné dans un lycée parisien) et les commissariats crados d’Engrenages. Et des flics d’Engrenages, pareil, ils sont pris les costumes, mais pas les manières. Parce que ce serait trop sombre dans ce qui, malgré tout, se veut une comédie sympatoche.

mardi 14 octobre 2014

Un homme très recherché





Ode au charme très discret et feutré d’Hambourg

Le genre : si vous avez trouvé la Taupe compliqué, fuyez

Un homme très recherché est une adaptation de John Le Carré, ce qui ouvre évidemment une parenté entre ce film et La Taupe. On y retrouvera d’ailleurs un personnage principal similaire, l’espion vieux garçon vaguement cynique qui a abandonné toute idée de vie privée à un dévouement sacerdotal et obsessionnel à son métier. On y retrouvera aussi ces scènes de bureau tendues et une volonté de réalisation très esthétisée.

Là où le parallèle, en revanche, s’arrête, c’est qu’Alfredson adaptait un roman sur l’espionnage dans les 60’s à Londres, là ou Corbijn parle de terrorisme en 2012. Exit, donc, les costumes trois pièces de Colin Firth, le tweed, la pipe, et les nœuds papillons, et de façon générale le décalage entre l’élégance des personnages et des lieux et la violence fondamentale de leur métier. Le film se construit cela dit autour de ce même constat doux amer que les espions sont nécessaires à la sécurité de tous, mais que leurs drames personnels doivent être tus, puisqu’ils n’existent au fond pas en tant que personnes.

Anton Corbijn montre la réalité d’une ville portuaire d’immigration, où même la maison des plus riches fait face aux docks, et peint un tableau très noir. Son passé de photographe se ressent très clairement dans sa volonté de composer finalement des tableaux des lieux clés en mettant toujours en valeur le contraste entre l’humain, très dérisoire, et une architecture particulièrement froide ou dégradée. Il s’amuse même de son propre parti-pris dans les dialogues, quand le personnage principal compare les lieux de rendez-vous qu’il donne et ceux de son interlocutrice, un bouge crado, éclairé à contre-jour  contre un rooftop chic saturé de la lumière très grise de Hambourg

Dans ce cadre, le leader d’une unité anti-terroriste mène deux combats : utiliser un terroriste soupçonné qu’il pense innocent pour remonter une filière, le tout en tenant en échec la police qui voudrait bien arrêter le soupçonné terroriste. Philipp Seymour Hoffman a approché le rôle avec, je pense, une douloureuse intensité, peu avant son décès. Le souffle pénible de son Gunther, asthmatique, fumeur invétéré et largement alcoolo, accompagne tout le film, qui prend le temps de montrer la lenteur de ses mouvements, en opposition à la vivacité de son esprit. 

Le reste du cast est également parfait, de l’ennemi de Hoffman, de Rainer Bock parfait en fonctionnaire méprisable et odieux de la police, obsédé par le résultat, à une Robin Penn ambiguë qui comprend les deux logiques, mais se garde bien de prendre une position trop tranchée. Willem Dafoe, moins orange qu’à l’accoutumé, joue lui une partition fine de banquier héritier qui lutte avec les fautes morales de son père, entre hébétude et rédemption. Autre acteur remarquable, le jeune Grigori Dobryguine, qui joue le potentiel terroriste totalement paumé, créant toujours une tension quand il est à l’écran tant le conflit entre son radicalisme, sa violence supposée et sa volonté de rédemption et de nouveau départ le rendent instable.
C’est en ce point que le film est assez curieux. Totalement dénué d’action, il parvient pourtant à créer une tension permanente, mais son rythme étrange et sa volonté d’avancer à son pas le rendent malgré cette tension évidente un tout petit peu chiant et froid, il faut bien l’admettre. 

De la même façon, hors du cast principal, tout le monde n’est réduit qu’à une fonction, notamment Rachid, personnage omniprésent mais littéralement sans une réplique, ou encore Jamal, le fils méritant que le « héros » pousse à la trahison, avec une très très forte ambigüité sur la façon dont ils se sont rencontrés, tant leur intimité physique semble être grande. Ambigüité que ne fait que renforcer une réplique anodine, plus tard : « nous devenons leurs amis, leur pères, ou leurs amants s’il le faut ». Pourtant, quasiment tout reste irrésolu quand le film se clôt.

J’adhère à ce parti-pris de mêler la forme au fond, de montrer à la fois la banalité et la tristesse du contre-terrorisme, pour l’opposer à la banalité du mal. Je reste cela dit perplexe sur la froideur générale de l’ensemble, qui ne fait que renforcer le caractère dérisoire de ce qui se passe, et particulièrement la naïveté curieuse de ce vieil espion qui pense que, si, il peut sauver tout le monde. Encore un bel objet, mais dénué d’émotion ou même de volonté de raconter une histoire mais plutôt un ressenti sur une histoire. Or, la difficulté de ce parti pris est qu’il doit s’accompagner d’une réflexion, soit morale soit narrative, ici singulièrement absente.

La minute geek : c’est un peu de la geekerie de vieux Sciences Pos mais mon camarade et moi-même avons tous les deux tiqué sur les mentions à répétition de ce que permet, ou plutôt ne permet pas, la Constitution allemande, en anglais dans le texte. Le script aurait quand même pu faire son boulot et s’apercevoir que l’Allemagne est organisée par une « loi fondamentale » et pas une constitution. Or ce choix de mot n’est pas innocent, surtout quand on connaît la passion de la langue allemande pour la précision des concepts.

La minute sériephile : l’ensemble m’a immanquablement fait penser à la série de la BBC MI-5. Et c’est là que ce film me pose un problème. Il est peut-être plus subtil et nuancé, mais il gomme à la fois le côté héroïque des personnages et la violence morale de leurs manipulations. Je trouve étrange ce refus de prendre parti ici, et de traiter l’ensemble de l’intrigue comme une simple rivalité de bureau à la COGIP. On peut reprocher à des séries comme MI-5 un parti pris étatiste selon lequel en matière de sécurité, la fin justifie également les moyens, mais le biais choisi ici me semble trop simple.

mercredi 8 octobre 2014

Deux garçons, la mer






Une expérience de synthèse complexe mais réussie

Le genre : Brokeback Mountain, edition Sinn Fein

Adapter le roman fleuve de James O’Neill, tout de même 643 pages au compteur, pour la scène était évidemment un challenge. Non tant sur le nombre de personnages, finalement assez restreint, ou même pour les décors, que sur la densité de l’intrigue. Comparé à Joyce pour son mode proche du stream of consciousness, la voix intérieure des personnages, le roman raconte en effet à la fois le cheminement de deux jeunes garçons qui se découvrent l’un pour l’autre de l’amitié, du désir puis un amour réel et le cheminement de l’un d’entre eux vers la lutte armée pour l’indépendance irlandaise.

L’adaptation de Christophe Garro est en effet suffisamment maline pour ne pas rejeter totalement des pans du roman, et les évoquer par touches, notamment le désir trouble du père Polycarpe pour le jeune Jim, afin de concentrer les rapports sur trois personnages, la relation naissante de Jim et Doyler et l’évolution sentimentale de McMurrough. Ceux qui n’ont pas lu le roman pourront lui reprocher d’avancer à marche forcée sur la question de l’indépendance irlandaise, dont certains enjeux deviennent assez flous, notamment le rôle de l’Eglise, qui n’a soutenu le soulèvement de 1916 qu’a posteriori.

Ce reproche n’en est pas vraiment, la ligne directrice affinée de la pièce s’affranchit avec une certaine élégance d’une difficulté majeure, à savoir corréler trop intimement le désir homosexuel et la volonté politique d’indépendance. Faire des personnages des républicains par calcul, pour s’affranchir d’une Angleterre puritaine qui rejette l’homosexualité, serait en effet à la fois trop simple et très vraisemblablement un contresens historique. 

Je reste un peu circonspect quant à la vision très moderne du couple des deux jeunes, qui évoquent comme une possibilité une vie de couple d’enseignant, qui me semble peu vraisemblable, même avec la naïveté de la jeunesse. De la même façon, Oscar Wilde, souvent mentionné par McMurrough comme modèle homo et irlandais, était marié, ne l’oublions pas. Et même si une lecture moderne voudrait faire de lui un personnage assumant sa sexualité, n’oublions pas non plus que la chute judiciaire de Wilde commence quand c’est lui qui intente un procès en diffamation au père de son amant qui l’a traité de sodomite. Gardons enfin à l’esprit que la république d’Irlande n’a dépénalisé l’homosexualité qu’en 1993… 

Mais peu importe, la pièce ne manque pas de finesse et la troupe relativement jeune, parvient à incarner des personnages d’âges différents, notamment les deux acteurs principaux, Thomas Cauchon et Philippe Le Gall qui héritent tous deux de rôles difficiles, Jim l’ado timide qui découvre l’amour et Doyler qui a grandi et découvert la sexualité trop vite, à la fois bravache et idéaliste. Pareil pour Jérôme Piques qui compose un McMurrough qui conserve tout le long son ambigüité, entre ses aspirations à trouver sa place en guidant philosophiquement le jeune couple et la violence de son désir purement charnel pour Doyler.

La mise en scène de Christophe Garro, également auteur de l’adaptation, se concentre assez logiquement sur ses personnages et évite l’écueil de vouloir créer des décors pour privilégier des détails et costumes simples et évocateurs, face à la pure impossibilité de représenter une pièce qui évolue sans cesse géographiquement, du manoir à la boutique, de la barricade à la plage… Je suis moins convaincu par les transitions en projection vidéo, mais je n’ai jamais vraiment adhéré à ce mélange, notamment dans le consternant Savannah Bay d’Eric Vignier à la Comédie Française en 2002. Comme quoi on ne se refait pas. 

Je n’ai pas pu m’empêcher de trouver l’ensemble assez mignon, malgré le tour dramatique de certains événements, et la pièce manque peut-être justement de d’une forme de noirceur, qu’elle cantonne à la sexualité, tarifée ou violente, à laquelle s’oppose l’amour de Doyler et Jim, rouleau compresseur de pensée magique qui l’emporte sur le reste. Après tout, pourquoi ? Le message est bien qu’il n’est pas plus grande liberté que de choisir qui l’on est… Equilibré, agréable et frais, et c’est déjà beaucoup.