mardi 22 décembre 2015

Star Wars : the Return on the Investment

Un scénario ? Pourquoi faire ? Le focus group a très bien réagi sans scénario

 


Le genre : tin tin tintintin tiiin tintintin tiiin tin tin tin tin
 

Soyons clairs, ce post est bourré de spoilers jusqu’à la gueule. Je vous remercie de votre attention.


Le Star Wars est un film d’action réussi ? Oui, encore que la première heure ne manque clairement de jus.

Est-il bien filmé et dirigé ? Oui, JJ Abrams a au moins eu ce mérite-là. Il a notamment voulu revenir à une mise en scène moins axée sur les effets spéciaux et en décors réels, qui fait du bien. Ce ne sera probablement pas vraiment le cas des deux suivants, qu’il a déjà délégué à un second couteau, mais passons.

Est-ce un bon divertissement ? Assurément, puisque le film s’éloigne des dialogues pompeux qui plombaient la trilogie précédente. C’est même un de ses points forts. Le fait que les dialogues soient un tant soit peu « réalistes » permet aux acteurs de jouer, plutôt que de se concentrer sur leur tirade et ajouter après une expression faciale pour faire bonne figure. Nous avons donc un Star Wars avec une direction d’acteur, ce qui est suffisamment rare pour être souligné.

Est-ce un bon Star Wars ? Si l’on prend l’angle de Star Wars en tant que franchise de produits dérivés, c’est réussi. Sur le reste, non. C’est même un franc foutage de gueule de JJ, mais manifestement ça marche. Pourquoi il n’est pas réussi ? Je ne prendrais que quatre thèmes : le concept du film, le traitement de sa mythologie, son contexte politique et son marketing.

Un nouveau concept

Reboot ou sequel ? Ne nous fatiguons pas, faisons un rebuel

Première image du film, le texte jaune habituel, marqué en capitales EPISODE VII. On affiche la couleur, c’est une suite pas un reboot. Le côté pratique des suites, quand on place toutes ses cartes sur la nostalgie des fans, c’est que ça permet mille blagues, clins d’œil et références. Le revers de la médaille, c’est que ça limite l’ouverture de l’univers, là où la précédente trilogie avait clairement les coudées franches.
Tout le monde a donc décidé que faire un remake scène à scène du IV serait donc l’idée du siècle. On commence donc par l’attaque d’un vaisseau par des stormtroopers et Dark Vador une mystérieuse figure de noir vêtue et casquée avec un sabre rouge. Il est méchant, méchant, méchant, mais laisse s’échapper R2D2 BB8, un droïde avec plein d’infos pour la résistance. Scène 2, sur la planète désertique de Tatooïne Jakku, un jeune homme une jeune fille lambda fait la connaissance du droïde, se trouve la cible de Stormtroopers puis s’échappe de la planète à bord du Faucon Millenium si, si du Faucon Millenium, qui traînait là miraculeusement.

Et tout ça dure gentiment deux heures, en multipliant les clins d’œil cools pour faire passer la pilule du fait que le scénario est déjà connu et qu’il n’y a pas une miette de suspens. Ah si, Han Solo, la figure du père, se fait tuer 20 minutes avant la fin du film. Ah ben non, en fait, ce n’est même pas une surprise, mais un autre décalque. 20 minutes avant la fin du IV, le père spirituel de Luke se faisait tuer par son père biologique. Ici le père spirituel de Rey se fait tuer par son propre fils biologique. Ouuh ! Nouveauté !

Euh, tu trouves ça cohérent toi, cette histoire de Luke ? On s’en fout c’est Luke Skywalker ! Les fans vont adorer

Ah, qu’il est cool ce bon vieux Luke Skywalker… Luke, le sauveur de la République devait former une GENERATION de Jedis (c’est pas moi qui le dit, c’est Han). Mais comme le premier est parti du côté obscur, il a lâché l’affaire pour aller bouder en Irlande (très joli money shot en hélicoptère, je le reconnais), tout en laissant des indices pour le retrouver, pour qu’on puisse le supplier de revenir.
Il a fait comme Yoda et Obi-Wan, qui, dès que la République s’est fissurée, sont partis se planquer au chaud en attendant qu’on les sollicite.  En gros, les Jedi, tu peux tout leur demander quand ils ont des subventions d’Etat, des salaires de fonctionnaires et des vaisseaux et palais de fonction. Si tu n’es plus au pouvoir, tu peux te démerder tout seul…

On peut légitimement se demander pourquoi le Premier Ordre tient tant à retrouver Luke. Il serait plus logique pour eux de commenter publiquement ce qui est un pur fait, à savoir que Luke a abandonné tout le monde à la première difficulté et que le combat pour la justice, toussa, toussa, il a préféré le sacrifier à des pures considérations personnelles et familiales. Que le dernier Jedi est un tocard égoïste et irresponsable, comme ses confrères.

La Force contre-attaque

De grands pouvoirs pour une tripotée d’irresponsables

Ce que ce film démontre en long, en large et en travers, c’est que les Jedi comme les Sith ont toujours eu largement raison de ne pas vouloir que leurs chevaliers se reproduisent. En gros, la Force étant héréditaire, chaque rejeton la chope, mais change de camp par rébellion contre ses parents… Dans ces conditions, qu’on préfère que les Jedis fassent ceinture plutôt que de se taper une armée d’ados en rébellion capables d’étrangler leurs camarades de classe par la pensée, ça se comprend.

Pour le reste... Kylo Ren, fils de Han et Leïa, est un ado gothique avec des super-pouvoirs, qui pète tout dans sa chambre dès qu’on le contrarie (deux fois en deux heures). Le super méchant du film est donc un mec que trois personnages (Rey, Hux et Han) amènent limite aux bords des larmes en lui disant qu’il est nul ou ingrat : c’est Vic Beretton avec un sabre laser. Si seulement Brigitte Fossey et Claude Brasseur avaient donné des cours à Han et Leïa, nous n’en serions donc pas là. Je ferais bien aussi une remarque sur le nom ridicule du personnage, mais n’oublions pas que nous sommes dans un univers ou un Jedi s’appelle Kit Fisto ! Kit Fisto !

L’accomplissement de soi ? Trop compliqué, on zappe, ça fera plus de combats au sabre laser

Ce méchant, supposément plein de potentiel, est encore « en formation ». Soit. Même s’il arrive à faire des trucs que personne dans l’ancienne trilogie ne savait faire, genre geler un tir de blaster à volonté et utiliser douze autres pouvoirs en même temps. Tout comme Rey, qui s’auto apprend à manipuler les esprits ou Finn qui apprend comme çà, pouf, à manier le sabre laser.

Tout ça jette aux orties tout le concept de formation du Jedi, puisqu’au fond pour gagner, il faut juste avoir la plus grosse Force. Rappelons un truc, dans la trilogie originale, Luke a attendu deux films et demi pour remporter un combat au sabre laser, juste avant de se prendre une copieuse branlée par l’Empereur. Là, Rey défonce le premier Sith qu’elle trouve dans toutes les épreuves de Force (respectivement lecture dans les pensées, jettage de trucs, regards veners et duel) sans aucun entraînement. OK elle sait utiliser un bâton. Conclusion : décidémment, sur tous les plans, Luke devait quand même un sacré putain d’incompétent. On se demande pourquoi tout le monde le cherche.
Sur le fond, Solo mentionne à un moment que Kylo Ren devait mal tourner, car il y a « trop de Vador » en lui. Le fait que Leïa ait été conçue avant qu’Anakin ne bascule dans le côté obscur est manifestement un détail. On est de fait passé dans une logique de pure prédestination. La métaphore sur la part d’ombre de chacun, sur le besoin de s’accomplir, avec le risque de se perdre en chemin, aux orties.

Non, c’est vrai je suis méchant, Kylo Ren dit littéralement « je suis déchiré » deux fois. Ça c’est du portrait par touches, Resnais peut aller se rhabiller.

 Vous ne le saviez pas, les sabre laser ont une personnalité, comme les baguettes d’Harry Potter

De la même façon, le sabre de Luke est un enjeu du film. Le toucher réveille des souvenirs chez les gens, dans un flash de lumière (et un artifice de scénario tout neuf) tout droit venu des séries des années 90. C’est le moment Charmed du film. Le dit sabre, par un nouveau hasard extraordinaire, se trouve justement dans le bar que les héros visitent. Sacré coup de bol quand on considère que ce sabre, c’est celui qui est tombé dans le puit de la cité des nuages quand Luke a perdu sa main.

Techniquement, ce n’est donc même pas le sabre de Luke (qui est vert), mais celui d’Anakin, un sabre qui a donc largement combattu pour le côté obscur, mais passons aussi. Peu importe, il a « choisi » Rey. Là encore, on oublie la part de la mythologie selon laquelle on devient Jedi en construisant son sabre, soulignée par Vador dans le VI, au profit d’un bête concept de double prédestination. Un beau message pour la jeunesse, si tu es choisi, tu réussiras, sinon, tu peux lâcher l’affaire malgré tes efforts.
Toutes ces nouvelles logiques participent à un intéressant glissement religieux. Là où la trilogie originale, et dans une certaine mesure la seconde, s’appuyaient sur des motifs proches du catholicisme (immaculée conception, lutte bien/mal pour le contrôle des âmes, intermédiation par le maître Jedi entre le jeune et la Force, rédemption de Vador…), cette nouvelle trilogie avance sur une base furieusement calviniste de double prédestination (à être sauvé ou à être damné) et de lien direct avec la Force. Je dois admettre que je ne sais pas quoi en conclure, mais je le constate.
Même la scène finale manque de cohérence par rapport à l'ensemble. Pourquoi cette façon symbolique de tendre son sabre à Luke pour qu’il reprenne le combat, alors qu’il a déjà son sabre ? Comme si tous les personnages avaient oublié que Luke les a lâchés. Au pire moment. Qu’il a contribué à créer leur ennemi avant de les laisser se faire gentiment éclater par l’Empire. Et qu’on lui redemandait de devenir le Luke des débuts, celui qui n’écoutait rien ni personne. Après tout, dans son état, l’Alliance Rebelle n’en est plus à un leader de merde près.

La menace floue

Résumé de la situation géopolitique pour les nuls. La République a été refondée, mais semble occupée à des cocktails chics sur Coruscant. Il paraît qu’elle a des vaisseaux, mais on ne les voit pas dans le film. Elle s’est même dissociée techniquement de l’Alliance Rebelle, réduite à un groupe de clodos fanatiques dirigé par la pauvre Leïa - qui commence à ressembler à une prof de sport lesbienne butch- et équipé de la bagatelle de 48 X-Wings pour son attaque finale, pas même un croiseur. En face, le Premier Ordre, qui est tout simplement nazi, symbole et signe de main compris, possède des flottes entières. Mais ne s'en sert pas, allez savoir pourquoi.

Les enjeux sont devenus à la fois simplistes et incompréhensibles. En gros, deux groupes à motivations religieuses se tirent la bourre pour tuer ou sauver un supposé messie, qui veut simplement qu’on lui foute la paix. La République, qui a bien compris que les Jedi ne lui valaient pas grand-chose de bon, s’est retirée de cette guéguerre, mais va quand même se faire détruire, pour une raison assez floue.
L’Empire, par la voix de Hux, commence à avoir aussi de sérieux doute sur les compétences des Sith. Mais peu importe, il va quand même détruire sans raison un système républicain qui ne fait rien plutôt que celui de ses ennemis qui s’apprêtent à lancer une attaque. Ce sont des méchants, rappelez-vous.

Je passe sur le fait donc que l’Etoile de la Mort la base Star Killer est tellement bien défendue que quatre escadrons de X-Wings suffisent à la détruire, selon globalement le même plan que dans tous les Star Wars. L’Empire devrait repenser la formation de ses ingénieurs... Mais bon, cette partie du film marche bien, ne boudons pas notre plaisir.

Le Réveil du Marketing


C’est dans le vieux pots qu’on fait la meilleure soupe, c’est bien connu. Mais comment Lego et Hasbro peuvent-ils vendre aux mômes le X-Wing qu’il leur ont déjà vendu il y a deux ans ? En changeant les couleurs, pardi ! Quelle est la logique de ce nouveau look noir et jaune des X-Wing ? Aucune, si ce n’est celle du market. Disponible pour 126€ ici. 126 € !!!
Pareil pour le sabre. Au fond, pourquoi racheter un sabre laser de sith rouge, si on en a déjà un. Parce qu’il une nouvelle feature, la garde en laser rouge, qui n’a, soit dit en passant, aucune fonction ni logique propre dans le scénario. Disponible pour 213€ ici

Et BB8 ! Qu’il est mignon ce petit robot rond ! Les mômes vont adorer. Il est aussi cute que Wall-E, mais, contrairement à Wall-E, on peut le reproduire à l’identique avec ses trois caractéristiques : il avance en tournant sur lui-même, fait des bruits rigolos et a un port USB. Magie de la technologie, les drônes sont justement à la mode en ce moment. Disponible pour 169€ ici

Il y a quand même un truc que j’ai bien aimé


Ce sont les coiffures. Je ne sais pas comment font Poe Dameron et Kylo Ren pour garder ces brushings magnifiques quand ils retirent leurs casques, mais une chose est sûre, à défaut de la Force, ces deux maîtrisent la laque et le sèche-cheveux.
Globalement, ce qui caractérise le Reveil de la Force, tout du long, c’est son incroyable manque d’ambition. 3D totalement inutile, décors déjà vus, scénario déjà vu, clins d’œil pour fans, simplification à l’extrême de tous les points de mythologiesqui posent problème. Le tout bien réalisé. Un pur produit de marketing.
S’il sortait seul, aujourd’hui, sans avoir le mythe derrière, il n’aurait pas plus d'impact qu’un Transformers et prêterait plutôt à rire tant son scénario est facile. C’est toute la Force de la pop culture.

mardi 19 mai 2015

Mad Max Fury Road


Le vacarme du vide

Le genre : épisode peu bavard d'automoto

Je suis un peu perplexe en sortant de Mad Max. Non que j’ai détesté le film, à vrai dire. Miller n’a certainement pas perdu la main quand il s’agit de réaliser de scènes d’action, la photographie est plutôt de qualité, le rythme soutenu… On ne passe pas un mauvais moment, comme, je suppose, devant un match de catch ou une course de voiture quand on aime les matchs de catch ou les courses de voitures. Quoique, non, comparer ce film à un match de catch ne rend pas justice au catch de la WWF et à la complexité de ses scénarios.

La réalisation est parfaitement maîtrisée,et, à mon avis beaucoup moins vulnérable au temps du fait de ses décors réels et de sa volonté de faire des vraies cascades. Je comprends aussi l’ambition de Miller, de mêler justement son savoir-faire aux possibilités numériques pour poursuivre son chemin et faire le film dont il rêvait. Il y a même de belles idées graphiques: les fantomatiques hommes corbeaux, la scène de combat de nuit et sa photo, ou encore l’utilisation intradiégétique de la musique avec la voiture sound system armée et son guitariste fou (je sais, c’est une obsession chez moi).

Oui mais voilà, le film n’a absolument pas de scénario. Un script, assurément, mais pas de scénario. C’est, littéralement, une pure fuite en avant, permanente. La fuite de Mad Max et d’un autre personnage pour échapper à leurs poursuivants, dans une forme de course qui ne s’arrête quasiment à aucun moment. Ce genre de concept aurait pu me séduire, si seulement il avait un sens, il servait une thèse ou, au moins, une forme de réflexion artistique.

Ici rien… Pire, Miller en joue avec ironie, s’en amuse, par exemple quand Mad Max refuse de donner son nom aux autres personnages, au prétexte que ça n’a aucun intérêt. Ce qui, au fond, est parfaitement vrai. Dès le premier plan, la graphie du titre claque comme un épisode de franchise, comme un jeu. C’est Mad Max Fury Road, comme on joue à Assassin’s Creed Unity. En jouant de ce principe, Miller se permet de ne pas introduire ses personnages, voire de ne pas les écrire du tout et de créer un monde totalement inconsistant, en supposant que le contexte est connu.

Ce que le film comporte de virtuosité ne compense en aucun cas sa totale absence d’âme, d’ambition, de personnalité et donc d’enjeu, dramatique ou artistique. C’est tellement creux que le fait d’avoir casté Tom Hardy, qui est un acteur épouvantable, ne pose pas de problèmes, puisque son personnage n’a quasiment aucun dialogue et aucune consistance. Il peut donc grogner tout son soûl sans qu’on voit (trop) que c’est la totalité de sa palette. Quant à savoir ce que Charlize Theron et Nicolas Hoult sont venus faire dans cette galère…

Qu'on ne vienne d'ailleurs pas me gaver avec la supposée dimension féministe du film. Oui, Charlize Theron est une femme. Non, son rôle n'est pas celui d'une femme forte, parce que son sexe n'a foncièrement aucun rôle dramatique dans ce film. C'aurait été Drax des Gardiens de la Galaxie, ça ne changeait pas grand chose. Quand à son combat pour sauver des mannequins (à moitié à poil pendant tout le film, probablement par féminisme), ça ne me semble pas faire se mouiller trop dans le combat pour l'égalité hommes-femmes que de dire que l'esclavage sexuel, c'est pas très cool.

Mad Max confirme en réalité une fracture qui se fait de plus en plus profonde entre un cinéma conçu uniquement comme spectacle et destiné à rentabiliser des salles 3D et Imax, et un cinéma à dialogue qui finira par ne plus être projeté en salle mais directement mis à la disposition de son public en pay-per-view, comme l’expliquaient d’ailleurs Spielberg et Lucas en 2013 (dans cette excellente interview à Empire).

Comme l’ensemble de la carrière de Miller, excepté le premier Mad Max, Fury Road est une pure commande de studio, calibrée au goût du jour.  Fury Road est-il bien réalisé et ludique ? Oui, mais ça ne l’empêche malheureusement pas d’être un film assez médiocre. Triste façon de boucler la boucle. 

La minute geek : je sais que je ne suis très calé en moteur de voiture, c’est peu de le dire. Mais je suis le seul à avoir trouvé un peu étrange que cracher de l’essence dans un pot d’échappement puisse augmenter le régime d’un moteur ? De ce que je crois me souvenir du concept du moteur à explosion, c'est un peu con, en fait.


La minute sériephile : savez-vous quel est le point commun entre plusieurs des seconds rôles du film (hormis les mannequins dénudés de ce grand film féministe). Plusieurs acteurs du film ont joué dans Farscape, une série qui, elle aussi m’a laissé un peu perplexe, tant elle-mêle de bonnes idées et de clichés. 

mardi 3 mars 2015

Kingsman


Le charme discret de l’élégance tapageuse

Le genre : académisme sale gosse

Je dois admettre que je partais avec peu d’objectivité voir Kingsman. Matthew Vaughn avait pour moi réussi à faire de loin le meilleur X-Men, en bazardant la photo sombre et les dialogues pompeux de Bryan Singer pour revenir à un esprit pop plus proche de l’idée du comics. Alors, évidemment, si on y ajoute des costumes croisés chalkstripes, des fauteuils clubs et toute la galerie des acteurs anglais classieux, je ne pouvais que partir conquis.

Ici donc, nous suivons les Kingsman, une agence de gentlemen espions, dont la couverture est un tailleur de Saville Row, dans leurs efforts pour sauver le monde d’un milliardaire du net mégalo. Avec ce postulat, on est dès le début dans une volonté de jouer avec le concept de James Bond, en le poussant dans ses retranchements les plus extrêmes. Et c’est ce Vaughn va faire avec une joie tapageuse pendant tout son film, de la première à la dernière scène.

Les deux premières scènes, dans le moindre détail, vont par exemple très loin dans cette nouvelle mouture du mythe de Bond qui mêle respect et ironie. La première nous montre, pour donner le ton, que les héros qui viennent d’infiltrer violemment un complexe militaire irakien portent, sous les gilets pare-balles et les cagoules, de détonnants costumes à rayures de banquiers. La deuxième poursuit la gamme avec l’entrée fracassante d'un Kingsman, tout de tweed vert et pochette rouge, le parfait Jack Davenport, puis l’entrée de la méchante, armée de prothèses de jambes/sabres, comme un hommage au haut de forme/scie de Goldfinger. D’une violence extrême, la scène tourne avec un humour détonnant autour d’un enjeu absurde, ne pas renverser un verre de whisky hors d'âge. Le ton est donné.

Le héros, fils racaillou d'un ancien Kingsman va nous servir de guide dans ses efforts pour intégrer l’agence (la scène où Colin Firth annonce à l'enfant la mort de son père et lui transmet la médaille fait d'ailleurs un joli clin d'oeil à Tarantino, dont l'esprit n'est pas loin). Il va donc nous faire découvrir par son regard décalé, le côté feutré et absurde de ce monde d’un espionnage aussi violent que suranné et snob. Procédé classique, mais le choix des décors, des costumes et accessoires, notamment les invraisemblables combinaisons à carreau de la Seconde Guerre Mondiale et le carlin Jack Bauer, est parfait pour maintenir cette dynamique goguenarde.

Vaughn met évidemment au centre de son meta film la discussion classique entre son Bond et son méchant, en la poussant très loin, avec un Samuel Jackson zozotant, casquette vissée sur la tête, qui invite Colin Firth en smoking à partager un big mac. La discussion porte sur ce que chacun voulait être en étant enfant : méchant mégalomane et flamboyant pour Firth, gentleman espion pour Jackson. Evidemment.

Mais tout en conservant sa trame d’archplot ultra-classique, Vaughn décide de partir dans un délire visuel absolu et de déconstruire dans les dialogues les codes, qu’il respecte pourtant à la lettre, en les exagérant. C’est là toute la force de Kingsman, cette volonté sale gosse de tout balancer. De faire du costume croisé un uniforme de super héros et de livrer en costume une série de scènes de baston plus délirantes les unes que les autres. Quitte à aller même très loin, quand, au centre du film, le héros massacre joyeusement une bande de civils. Certes bien fachos, mais civils, malgré tout.

Tous les ingrédients du Bond y sont finalement: la bond girl, la scène de cul finale, la base secrète du méchant, le responsable des gadgets mi-amusé, mi consterné par son poulain (Mark Strong, pince sans rire à souhait), mais Vaughn prend tout à contre-pied. La Bond girl n’a aucun intérêt pour le héros, la princesse (littéralement) à sauver est à la limite de la nymphomanie, les gadgets ne fonctionnent pas et Q refuse de prêter ses jouets…

Jusqu’au bout, avec un sens de la mise en scène consommé, Kingsman mène avec brio cette partition paradoxale, respecter le code et le pervertir, jusqu’au traitement très ironique des punchlines, qui sont pourtant présentes. Je sais que c’est une de mes marottes, mais même le traitement de la musique y est très pensé, notamment dans la bataille finale où la musique disco n’est pas un habillement, mais un enjeu de scénario, là aussi méchamment décalé.

Même dans l’approche de ses deux personnages principaux, Vaughn est là aussi à la fois classique et moderne, tant il passe le film à suggérer, ce que les Bond ne font jamais, que la personne importe peu devant sa fonction, son nom de code. La scène finale suggère d’ailleurs par un parallélisme rigolard à quel point le maître et l’élève sont interchangeables. L’un est devenu l’autre.

Parce que son humour distancié et très british est omniprésent, Kingsman peut se permettre son outrance et sa violence. Comme dans son précédent film, Vaughn signe à la fois un vibrant hommage à la saga Bond, tout en s’en moquant ouvertement. C’est un numéro d’équilibriste, mais que le style sauve en permanence. Et après tout, n’est-ce pas logique dans un film dont la devise des deux scènes clés est « manner maketh man » ?

La minute sériephile : Jack Davenport est un acteur qui gagne à être vu en série. Autant dans la brillante sitcom Coupling, de Steven Moffat, où il excelle en anglais upper middle class coincé, que dans Smash, où il est plus étonnant en compositeur playboy tête à claque.


La minute geek : dans l’armurerie des Kingsman, Colin Firth fait une curieuse réflexion sur le fait que les Ipads des Kingsman ne sont que des Ipads, la technologie les ayant rattrapés. Intéressante réflexion à tiroir de Vaughn, encore une fois, puisqu’au final, ce n’est pas le hack qui sauvera le monde mais bien un gadget vieux comme le monde, la chaussure avec lame intégrée, déjà présente en 1963 dans Bons baisers de Russie

jeudi 12 février 2015

Jupiter Ascending

Quand tu as fait Matrix, tu peux tout te permettre, pour le reste de tes jours



Le genre : recette indigeste

Pour le scénar, on va la faire assez courte. Une gentille jeune fille méritante et nettoyeuse de toilettes de son état s’aperçoit un jour qu’elle est l’héritière d’un empire industriel intergalactique de vente d’humains. Hilarity ensues.

S’en suivent deux heures sept très confuses, parsemées de scènes d’action, normal, de punchlines et tentatives d’humour assez incongrues et de jeu calamiteux de la part de l’ensemble du cast. Le tout sur fond de vol assez décomplexé de toutes les idées d’univers SF qui ont marché, ou non, dans les 20 dernières années.

En vrac, Jupiter se fait kidnapper par des Roswell carnassiers, sauver par un loup garou blond platine très queer lors d’un combat de chasseurs spatiaux dans Chicago, Transformers 3 style, puis arrive sur Naboo. Là, elle doit combattre des dragons issus du calamiteux Super Mario Bros, se confronter à l’administration de Brazil, faire face à un complot gréco-romain et enfin combattre le vilain dans un décor qui mixe le vaisseau du méchant de Guardians of the Galaxy et Geonosis de Star Wars. Entre temps, sa famille humaine, d’origine russe, mange de la choucroute en rotant et en parsemant les dialogues de « par les couilles de Staline ». Un film d’art et d’essai, quoi.

Les Wachowski n’ont pas perdu le sens de la scène d’action, c’est indéniable. En fait si, quand on pense que dans Matrix ils avaient réinventé le genre, et qu’ici on est plutôt dans du bon Michael Bay. En dehors de ça, le film pourrait confiner au génie WTF d’un Battleship, mais ne cesse de se prendre au sérieux, notamment son méchant parfaitement grotesque, Eddie Reddmayne. Le pauvre a manifestement eu pour consigne de se faire passer pour Gary Oldman dans le 5ème élément - comprenez de parler très doucement et calmement 4 répliques sur 5 puis de hurler la 5ème.

Tout dans le film sent l’ambition, mais sent aussi qu’à un moment, le studio a compris l’ampleur du désastre et a commencé à essayer de limiter les dégâts. Résultat, à force de coupes mal gérées l’univers ne tient pas la route une seconde, tant les pistes sont lancées puis totalement abandonnées au cours du film.

Deux exemples : pour commencer les méchants enfants dont l’héroïne est la mère réincarnée… Admettons ce postulat débile. La manière de traiter la question légale est plutôt marrante. Mais la question de savoir lequel l’a assassiné est vaguement présentée comme un enjeu, avant que le film ne l’oublie une bonne heure, pour finalement traiter la question par-dessus la jambe. Oui, le méchant est bien le méchant. La sœur n’en pense pas moins, et a manifestement un plan, aussi vite largué qu’évoqué. L’autre frère est traité de la même façon, avec une grosse hésitation entre le porno chic façon Grey et la bitch de teen movie. Puis il disparaît du script et n'est plus mentionné.

Deuxième exemple, le sous-texte vaguement anticapitaliste du film. En gros, les trois méchants se partagent un empire, des planètes dont ils « moissonnent » les humains pour en faire de l’antiride Q10, en mieux. Le film évoque la « concurrence » qui justifie leur lutte sans aller très loin dans sa logique, puisque les principaux concurrents, ce sont les trois mômes eux-mêmes. La logique voudrait qu’ils bossent ensemble, puisqu’ils sont tous actionnaires de la même boîte, mais en fait non. Parce qu’on s’en fout.

Plus largement, la société du futur est présentée comme ultra-légaliste et tracassière, sauf pour les personnages, qui se massacrent allègrement, ouvrent le feu sur les flottes de leur armée et autres. Selon les besoins immédiats du scénario, le film opte pour une société verrouillée par les avocats ou une autre où la noblesse donne tous les droits…

Je passerai charitablement sur l’histoire d’amour parfaitement absurde entre le héros, « mi homme mi quelque chose comme un loup » et l’héroïne « qui adore les chiens »… Et sur les scènes d’humour incongrues sur la famille russe, probablement mise ici en contrepoint, pour faire l’inverse des Gardiens de la Galaxie qui évacuait la Terre dès l’intro.

Bref, à part quelques jolies images pas très originales, pas grand-chose à sauver. En même temps, les Wachowski, à part le premier Matrix et Speed Racer, pour son esthétique, c’est quand même l’histoire d’un naufrage magnifique…

La minute sériephile : triste destin que celui des ados de That 70’s Show. Entre Topher Grace qui cachetonne et la pauvre Mila Kunis qui vient ici ruiner le peu de crédibilité que Black Swan lui avait offert. Il n’y a bien qu’Ashton qui s’en soit sorti, en gigolant. Monde de merde.

La minute geek : c’est un peu compliqué tant tout est pompé à droite à gauche.

                                                                 

mardi 10 février 2015

Les fêtes véntiennes, Opéra Comique

Somptueux et sexy



De quoi ça parle
A Venise, la veille du Carnaval la Folie chasse la Raison et prend le contrôle de la ville.

J'aime 
Les différents tableaux liés par ce thème commun de la tentation, du désir et du plaisir d'y succomber.
Une mise en scène somptueuse, volontairement décalée et sexy, qui sert sans vulgarité ce propos très léger sur le caractère éphémère et violent du désir.
Des idées de mise en scène spectaculaire, de l'arrivée des gondoles au deux ex machina du dernier tableau.
Les tableaux d'ouverture et de fermeture qui jouent avec beaucoup de finesse sur un décalage entre les costumes modernes et les costumes d'époque, pour renforcer le contraste entre la réalité et le monde parallèle que constitue le carnaval.
Un orchestre très en forme, emmené par un William Christie sautillant et très en forme.


J'ai moins aimé
Peut-être un brin long dans les moments de ballet, mais c'est que je ne suis pas forcément très fan d'opéra ballet.

Les cartes du pouvoir, théâtre Hébertot

Efficace et bien mené



De quoi ça parle
48 heures dans une campagne primaire démocrate aux Etats-Unis entre conseillers, politiques et journalistes. 48h qui vont défaire une carrière.

J'aime bien
L'ensemble de la troupe est très juste, dans les rôles principaux comme dans les rôles plus anecdotiques.
Un décor très bien conçu pour multiplier les lieux et les ambiances.
L'utilisation de la musique dans une écriture quasi-télévisuelle, assez intéressante.
Des idées de mise en scène intelligentes pour contourner certains des écueils propres à la modernité du propos. Notamment l'omniprésence du téléphone portable.
Raphaël Personnaz convaincant de bout en bout, notamment quand le personnage perd pied.

Je suis moins convaincu
Par cette difficulté de donner des prénoms américains à des acteurs français. J'ai toujours la curieuse impression de voir du théâtre doublé. Mais c'est assez peu important.
Une dernière partie légèrement moralisatrice en mode "les politiques sont déconnectés des vraies gens". Je suis un peu sévère, cette scène est vite contrebalancée par le très beau monologue de Frémont sur la loyauté.

Pour poursuivre
Plus que House of Cards, dont le scénar US a été écrit par l'auteur de la pièce, les Cartes du Pouvoir m'a donné envie de revoir The Newsroom, notamment sur le rapport ambigu entre presse et staffs politiques dans les bus de campagne.

lundi 9 février 2015

Fragments, aux Bouffes du Nord

Doit-on rire de tout ?



De quoi ça parle
De rien de précis. De solitude, de folie, du temps qui passe, de la vanité de l'existence... Cinq pièces courtes de Beckett, sans personnages, des tranches de réflexion, autant sur la vie que sur le théâtre en soi.

J'aime
La violence radicale des deux pièces féminines sur le radotage et la solitude. Proprement terrifiant.
Le plafond du théâtre, qui est fort joli.


J'aime pas
Je suis pas bien sûr de piger le truc. C'est censé être du Beckett drôle, et une partie de la salle se gondole, mais j'ai surtout trouvé ça affreusement déprimant.
C'est un peu le nœud du problème, ce public qui fait exactement ce qu'on lui dit. Le programme dit que c'est du Beckett drôle alors on rigole. Sans savoir de quoi ni pourquoi.
Ce postulat forcément moderne de "revisiter" Beckett, comme dans Top Chef, pour dire qu'il est drôle. Alors que ces fragments portent sur une forme d'entraide désespéré, ou sur une croyance érigée en mode de vie, qui ne sont que deux pis-aller pour faire face à un constat sur la très profonde solitude de l'homme.

vendredi 6 février 2015

Interstellar



Démonstration magistrale d'écriture

De quoi ça parle
L'humanité a fini par flinguer la planète, mais, fort heureusement, la coolitude nonchalante et l'attitude un peu connard de Matthew McConaughey vont sauver notre avenir, contrairement aux moues pleureuses d'Anne Hathaway.

J'aime:

  • Complexe dans son univers mais remarquablement cohérent, comme tout Nolan. 
  • Le retour de sa petite obsession de se foutre du monde, en annonçant au bout de 5 minutes par des interviews d'anonymes que, oui, l'humanité sera sauvée, puis en le faisant oublier pour créer un suspense évident. Et bien évidemment la solution qui est dans le plan d'ouverture.
  • De la vraie émotion, si rare dans la SF... 
  • Un génie marketing assez poussé qui vient renforcer l'effet de surprise, quand un personnage clé majeur débarque alors que la star qui le joue n'a jamais fait aucune promo. 
  • Michael Caine, bah, Michael Caine, quoi. 
  • Hans Zimmer qui pousse le bouchon loin en osant l'orgue. 
  • Le cast impeccable, notamment McConaughey, parfait, comme toujours, ai-je envie de dire.
  • Le parti-pris d'effets spéciaux peu numériques et en 2D. L'idée de faire monter une tension juste avec le plan d'une aile qui tremble. Ou comment Nolan démontre en une seconde et demie.  la vanité d'un Gravity condamné à devenir ringard parcequ'il repose à 100% sur sa technologie 


J'aime moins: 
  • 45 bonnes minutes de trop, notamment la section centrale (la première planète) qui n'a strictement aucune fonction dans le récit. Ne me dites pas que si, puisqu'un personnage disparaît. Ce personnage n'avait lui-même aucune fonction. Il n'aurait pas été là, ça ne changeait rien au film. 
  • Nolan qui a toujours du mal avec ses scènes majeures, la scène de révélation clé du film étant parfaitement grotesque. Oui je parle de Jessica Chastain jetant ses feuilles Clairefontaine en hurlant Eurêka! Incroyable similitude avec Sophie Marceau à la fin de l'Etudiante de Pinotteau. Pas exactement une référence de fin réussie... 


Une parenthèse geek tout de même: de façon intéressante, les années 10 sont en train de revoir totalement le paradigme du voyage dans le temps. Des romans comme Blitz de Connie Willis (trop long mais cool) ou des BD comme UW1 (cool et cool), et bien entendu Interstellar partent désormais du principe que le temps est immuable, que le présent est déjà la résultante de tous les efforts de voyageurs du futur pour le changer. Et c'est très intéressant en termes de narrativité, dans la mesure où, concrètement, ça veut dire créer un suspense alors qu'il n'y en a pas. Interstellar s'en sort magistralement, Looper s'était un peu méchamment pris les pieds dans le tapis, malgré d'autre qualités.

Un illustre inconnu



Et si je faisais un meilleur toi que toi ?

De quoi ça parle
Monsieur Gris est chiant, gris et invisible. Oui mais voilà, il est capable d'imiter n'importe qui, et s'est créé un atelier de masques digne de Fantomas. Il espionne puis devient quelqu'un d'autre quelques heures, juste comme ça, c'est son truc. Jusqu'au jour où il à l'occasion de voir à plus long terme.

J'aime

  • Un polar français assez curieux mais bien conçu, qui explore un territoire inattendu (tout le contraire en somme de Elle l'adore). On ne sait jamais trop où Delaporte veut nous emmener, ce qui crée une tension fine mais réelle. 
  • Kassovitz excellent dans ses deux rôles, le mec insignifiant jusqu'au creepy et le violoniste snob. 
  • Une fin très douteuse moralement, mais totalement assumée, ce qui me plaît.

J'aime moins

  • De petites facilités dans l'intrigue policière qui rendent le propos très peu crédible (l 'absence d'autopsie dans l'enquête, qui aurait immédiatement éventé l'affaire).
  • Quelques petites afféteries qui sentent bien le Sciences Po, genre les noms de toutes les personnes dont Kassovitz emprunte l'identité, qui sont tous les noms réels d'écrivains connus sous leurs pseudo. Ha! Ha! Wink! Wink, mais tout ça n'amène pas grand chose.

Hiatus

Oui, j'ai été un peu silencieux quelques semaines. C'est principalement lié à un changement professionnel et à un changement technologique. Bref, la magie sous forme d'un nouveau laptop me permet de revenir en forme.

Comme ma haine peut refroidir vite (pas toujours, cela dit, dix ans après, je trouve toujours que La Revanche des Siths est un film au message politique particulièrement dangereux), je ne vais pas chroniquer dans le détail ce que j'ai vu ces derniers temps.

On va plutôt faire une série de  j'aime/j'aime pas rapides. Go! Go! Go!