Le genre : film
bien filmé ?
J’ai un peu de mal, là, je dois dire. Je ne sais ni trop
quoi dire, ni par quel bout prendre ce film. Je ne peux pas commencer cette
critique en essayant de résumer l’histoire, l’intrigue de ce film, faute d’être
certain d ‘avoir compris de quoi ça parle. D’un mec qui revient de la guerre,
un peu cinglé et violent, très doué pour faire de l’alcool avec n’importe quoi.
Et du chef d’une secte type Scientologie, à ses débuts. Ils se rencontrent et
deviennent amis. Ou ennemis. Ou peut-être ni l’un ni l’autre.
The Master est un
film à l’évidence très maîtrisé, très esthétique, mais devant lequel je reste
un brin sceptique. PT Anderson sait très bien diriger ses deux acteurs, Joaquin
Phoenix dans sa folie imprévisible, à la fois rigolarde et destructrice, et
Phillip Seymour Hoffman, patriarche débonnaire en apparence mais qui masque mal
sa violence dès que la situation lui échappe. Mais je ne comprends pas le sens
de l’affrontement entre ces deux natures. Je ne suis pas même certain qu’il y
ait un affrontement. Que veut dire le film ? Que Freddie Quell (Phoenix)
est trop radicalement libre pour tomber sous la coupe d’un gourou, malgré les
efforts de Lancaster (Hoffman) ? Que les sectes ne sont finalement que le
produit d’une forme de volonté de contrôle personnel de leurs créateurs
(waouh ! quelle trouvaille !) ?
Quoiqu’il ait été vendu comme tel, le film ne porte pas sur
la Scientologie. Malgré une scène qui remet en question les théories farfelues
sur le voyage dans le temps du gourou, le film n’est pas vraiment là. Il parle
vaguement de la mainmise du gourou sur sa famille et sa communauté, mais sans
vraiment aborder le sujet. Il est souvent onirique, mais sans jamais basculer
dans le monde fantasmé. Dans l’une des scènes, sans que l’on sache pourquoi,
tout d’un coup, toutes les femmes sont nues. Délire visuel de Freddie l’obsédé,
rituel de la secte, dénonciation de la dérive potentielle de ce type de
communauté, la question n’est pas tranchée... Pareil pour la scène Lynchienne du
cinéma vide, même si celle-ci est clairement indiquée comme un rêve.
C’est un peu ce qui m’intrigue. Ce n’est pas un film sur les
sectes, pas un film sur la liberté, pas un film sur la famille, pas un film sur
la guerre, sur l’amour, sur l’alcool. Je ne vois pas quel est le thème, le fil
conducteur.
C’est d’autant plus curieux que dans Magnolia ou Boogie Nights,
Anderson maniait plus de personnages, d’intrigues peu liées mais creusées, en
créant un ensemble, un thème, une réflexion. Ici, rien. Les Cahiers du Cinéma
peuvent dire autant qu’ils veulent que c’est un film sur la fuite ou
l’impossibilité de corriger le passé, ce ne sont que deux des micro questions
que le film pose, sans vraiment y apporter de réponse.
A la rigueur, la fuite est l’un des motifs esthétiques,
voire le running gag du film, avec un parallèle
permanent entre deux notions de fuite, les poursuites comiques dans lesquelles Quell se retrouve
et le nomadisme de luxe de la famille.
Bref, c’est joli, mais curieusement vide de sens. Concrètement,
à force de n’aller nulle part, on s’emmerde un peu quand même. Un emmerdement
doucereux, paisible, pas désagréable. Un peu comme mourir de froid. Pas inintéressant, mais pour moi à ranger
dans la même catégorie que les biopics, en plus chic. Toujours bien faits,
jolis costumes, performance des acteurs, mais à quoi bon ?
La minute du
sériephile : Um, j’ai beau fouiller, les liens ne se font pas.
La minute geek :
c’est intéressant, les deux jeunots de la famille, le fils et le gendre, jouent
tous les deux dans Battleship. Le
plaisir coupable de PT Anderson ? Je ne pourrais pas l’en blâmer.
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